Le diagnostic n’est pas obligatoire, mais les professionnels de l’immobilier ont parfois intérêt à le recommander à leurs clients. Devoir de conseil oblige.
L’état parasitaire deviendra-t-il un jour obligatoire ? Jusqu’à présent, les pouvoirs publics ont systématiquement retoqué les propositions d’un diagnostic supplémentaire à la vente et seul le département du Finistère l’a imposé dans quelques-unes de ses villes.
Moralité, quand des acquéreurs découvrent le vorace champignon après s’être endetté pour acquérir le bien de leurs rêves, l’affaire finit souvent devant les tribunaux. Qui va payer les travaux d’éradication qui se chiffrent généralement à plusieurs dizaines de milliers d’euros ? La justice n’hésite pas à reprocher au professionnel de l’immobilier de ne pas avoir alerté sur ce point comme en témoignent plusieurs jurisprudences récentes.
En septembre 2020, la cour d’appel de Poitiers (*) a ainsi condamné un agent immobilier (82 000 euros tout de même) parce qu’il n’avait pas recommandé à ses clients de mener des investigations plus poussées alors que le diagnostiqueur évoquait une « pourriture cubique » dans son rapport.
L’exemple n’a rien d’un cas isolé. Quelques mois auparavant, la cour d’appel de Rennes (**) avait condamné un notaire parce que lui aussi, il n’avait pas suggéré la réalisation d’un état parasitaire dans un immeuble malgré des soupçons de mérule. Manquement à son devoir de conseil – qui plus est en Bretagne où le champignon est omniprésent -, le notaire se voit condamné au titre de la perte de chance : si les acquéreurs avaient été correctement informés, ils n’auraient sans doute pas contracté.
Troisième exemple, fin 2019, la Cour de cassation (***) a confirmé l’annulation d’une vente. Après avoir signé une promesse de vente, des acquéreurs avaient refusé de signer l’acte authentique, au motif qu’une information sur la réalisation de travaux liés à la mérule, n’avait pas été portée à leur connaissance au moment de la promesse. La justice a, là aussi, retenu la faute de l’agent immobilier qui avait failli à son devoir d’information.
Et on pourrait remonter le temps et égrainer d’autres jurisprudences de la sorte. Faute d’un état parasitaire obligatoire, la mérule se transforme parfois en marathon judiciaire, où les responsabilités des professionnels sont souvent (pour ne pas dire systématiquement) recherchées. Car si l’acheteur, profane par essence, peut passer à côté de traces d’humidité suspecte, ou carrément de bois détériorés, le professionnel de l’immobilier, lui, est censé avoir la puce à l’oreille.
(*) Cour d’appel de Poitiers, 1re chambre civile, 15 septembre 2020, n°18-03042.
(**) Cour d’appel de Rennes, 1re chambre, 26 mai 2020, n°18-07407.
(***) Cour de cassation, ch. civ. 1, 14 novembre 2019, n°18-21971.